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Francois
Fillon combatif, lors du meeting du 29 janvier, à Paris. Il se voulait alors exemplaire,
irréprochable. Eric Feferberg / AFP
Non
seulement la tradition républicaine voue une passion pour l’égalité, mais elle
s’est construite sur l’opposition entre vertu et corruption. L’héritage
révolutionnaire est ici prégnant : dans sa volonté de rupture avec l’ordre
ancien, Robespierre « l’Incorruptible » a fait de la « morale publique » l’un
des fondements de l’ordre nouveau. Après l’épisode de la Terreur, le républicanisme
ne devient moralisme que dans la seconde moitié du XIXe siècle. Victor Cousin,
Jules Simon, Étienne Vacherot, Renouvier et surtout Jules Barni placent la
question de la morale au cœur de la philosophie de la République. Le
républicanisme devient moralisme. Le dévouement à la chose publique ou la
«vertu civique» est un principe structurel d’un État républicain incarné par
les grandes figures politiques de l’époque : Victor Hugo, Jules Ferry,
Gambetta, Jaurès.
Pourtant,
dans ce domaine comme dans d’autres, la République et ses représentants entretiennent
l’esprit de contradiction. Souvent présentée comme un «âge d’or», la IIIe République
est aussi celle
des grands scandales politico-financiers. Le président Jules Grévy a dû
démissionner à cause de l’affaire du «commerce» de décorations impliquant son
gendre, le député Daniel Wilson. La seule qualification qui existait
alors était la corruption, inapplicable en l’espèce à Wilson ; d’où la création
du délit de « trafic d’influence », bien connu par de nos contemporains... Une
série d’affaires - Crawford (1879), Panama (1892), Rochette (1910), Oustric
(1930) ou Stavisky (1933) - a nourri la contestation même de la République par les
ligues d’extrême-droite (tentative de putsch du 6 février 1934), puis par le
mouvement poujadiste sous la
IVe République. Quant à la Ve République,
malgré la probité exemplaire du fondateur du régime, le Général de Gaulle, la
vie politique est rythmée depuis la fin des années 1980 par des scandales
politico-financiers qui mettent en lumière le rapport «problématique» entre
argent/intérêt public et argent/intérêt privé. Une confusion des genres qui
sape la confiance censée nourrir le lien entre les citoyens et leurs
gouvernants. Or l’heure n’est plus à l’indifférence, à la tolérance et à
l’acceptabilité sociale des pratiques de corruption, d’emplois fictifs ou même
de conflits d’intérêts liés au cumul de fonctions. L’heure est à la défiance.
Même si la République
et la démocratie ne se confondent pas, leur imbrication historique (du moins en
France) fait que l’affaiblissement de l’une ne peut qu’affecter l’autre.
Autrement dit, la crise démocratique est aussi une crise de la République. Une
relation que Montesquieu établit en ces termes : «Il ne faut pas beaucoup de
probité pour qu’un gouvernement monarchique ou un gouvernement despotique se
maintiennent ou se soutiennent. La
force des lois dans l’un, le bras du prince toujours levé dans l’autre, règlent
ou contiennent tout. Mais, dans un État populaire, il faut un ressort de
plus, qui est la VERTU».
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