martes, 4 de octubre de 2016

«Tout référendum n’est pas manipulatoire», por Florence La Bruyère – Liberation


Fuente: Liberation
Les Pays-Bas, le Royaume-Uni, la Thaïlande, la Hongrie, la Colombie et bientôt l’Italie : l’année 2016 est ponctuée de référendums, de portées et de natures très différentes. Les résultats de ceux de dimanche, sur les demandeurs d’asile en Hongrie (invalidé mais massivement en faveur de la politique de rejet du Premier ministre) et sur l’accord de paix avec les Farc en Colombie (quorum atteint mais rejeté par une faible majorité), interrogent (lire plus bas). Faut-il se débarrasser de cet instrument de démocratie directe ? Non, répond Yves Sintomer, professeur en science politique à l’université Paris-VIII et auteur de nombreux ouvrages sur la démocratie participative.

Y a-t-il plus de référendums aujourd’hui qu’avant ?

Oui, clairement, il y a une montée globale du nombre de référendums. Mais il faut les différencier. Il y a ceux où, comme en Colombie, une question est posée par le haut, à laquelle les citoyens répondent, et qui donne lieu à une décision. Il y a les référendums révocatoires, un processus qui vient du bas, et qui est en discussion en ce moment au Venezuela pour Maduro, pour démettre un élu au cours de son mandat. Et ceux qu’on appelle en France les référendums d’initiative populaire, ou en Suisse des initiatives populaires, où à partir d’un certain nombre de signatures une question est soumise au vote des citoyens. Qu’on prenne les trois ensemble ou séparément, on assiste à une croissance du nombre de référendums.

Comment l’expliquer ?

Dans les vagues de démocratisation à travers le monde, les nouveaux pays démocratiques ont souvent adopté des mécanismes de démocratie directe, en plus des mécanismes de démocratie représentative. Et dans les pays qui la connaissaient déjà, il y a eu une demande de plus de participation, comme en Allemagne après la chute du Mur.

Y a-t-il une corrélation entre montée des populismes et augmentation des référendums ?

Je ne pense pas. Déjà, je me méfie beaucoup de l’appellation populiste, qui est employée de façon beaucoup trop large pour caractériser de façon pertinente des mouvements que, par ailleurs, rien ou presque ne rassemble. Toute politique fait appel aux émotions. Et prenez la Suisse : vous avez un régime qui n’est pas populiste en soi - il peut y avoir des leaders populistes, mais ce n’est pas ça qui en fait un régime populiste - alors que la moitié des référendums dans le monde, jusqu’à il y a quelques années, avaient été faits en Suisse.

Mais le «peuple» ne vote-t-il pas sous le coup de l’émotion ?

Bien sûr, le peuple peut voter de façon émotionnelle. Le peuple peut se tromper. Mais il en va de même des élites politiques. On n’a pas d’un côté des élites qui auraient la rationalité et de l’autre des peuples irrationnels. Dans l’histoire, les élites politiques ont entraîné des pays dans des aventures extrêmement irrationnelles. Prenez Hitler. Prenez Blair et Bush sur la seconde guerre du Golfe. Oui, le peuple peut se tromper. Mais les élites aussi.

Le référendum reste-t-il un bon outil de démocratie directe ?

Oui. Mais s’il vient tout seul, s’il n’est pas accompagné d’une transformation plus globale du système politique, alors le risque que le référendum soit mal utilisé est plus grand. En Colombie, la participation a été très basse, mais c’est le taux habituel des scrutins dans le pays. Quand on a une démocratie qui, sous tous ses aspects, fonctionne mal, on peut difficilement penser qu’un seul instrument institutionnel, même légitime, va pouvoir tout transformer. Un des courants d’innovation aujourd’hui, sur la côte Ouest des Etats-Unis, est l’utilisation des jurys citoyens tirés au sort qui discutent des questions soumises à référendum dans des bonnes conditions et dont les conclusions sont envoyées aux citoyens avant qu’ils votent. Il y a des réflexions pour améliorer cet outil-là.

C’est donc un outil qui nécessite un accompagnement ?

Comme tous les outils. Des élections dans un système de partis gangsters qui n’ont comme préoccupation que de piller l’Etat s’ils sont élus ne vont pas résoudre les problèmes du pays. Prenez le système proportionnel : en Espagne, les partis sont incapables de s’entendre pour former un gouvernement. En Allemagne, ils y parviennent. Les mécanismes institutionnels n’ont pas en soi de valeur intrinsèque. Il faut les replacer dans un contexte. En Hongrie, on a un tournant autoritaire qui s’est fait par les élections et une société qui est en crise profonde. Le référendum ne va pas bouleverser les choses. Au contraire, il va s’inscrire dans cette tendance plus globale.

Mais l’instrument «référendum» peut être dévoyé…

Oui, il y a plusieurs manières de manipuler le référendum. Par la question, par le bassin de population qui vote, par le calendrier du référendum - poser la question à tel moment plutôt qu’à un autre joue forcément. De façon globale, quand l’initiative vient d’en haut, les possibilités de manipulation sont plus grandes, parce qu’il y a un acteur au pouvoir en mesure de décider cela. Ça ne veut pas dire que tout référendum est manipulatoire. Celui en Colombie ne l’était pas. On peut penser que celui d’Orbán l’était.

Pays-Bas, Royaume-Uni, Hongrie… Référendums et Union européenne ne font pas bon ménage. N’y a-t-il pas incompatibilité entre référendums et questions supranationales ?

C’est encore une fois comme pour les élections. Le référendum, comme ces dernières, s’applique à l’échelle locale, nationale. Mais pas à l’échelle transnationale, où réside l’essentiel des problèmes. C’est un outil en décalage, qui n’est que partiellement adapté pour les prises de décision.

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